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Thonon-les-Bains

Armelle et Jeanine - Un accompagnement fraternel à Thonon

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Armelle et Jeanine témoignent de leur rencontre et du chemin d’accompagnement fraternel qu’elles ont emprunté ensemble. Cet interview vous plonge dans leur histoire, qui s’est écrite entre les murs de l’équipe locale du Secours Catholique de Thonon. 

Pouvez-vous me raconter votre première rencontre ? Comment vous êtes-vous connues ?

Jeanine : Armelle avait contacté la Société Saint-Vincent-de-Paul à Evian pour suivre des cours de français. Comme cette association ne proposait pas l’activité, sa présidente m’a sollicitée en me donnant les coordonnées d’Armelle. Je l’ai donc appelée pour lui proposer de se présenter au Secours Catholique à Thonon pour suivre les cours de FLE, ce qu’elle a accepté aussitôt. Cet appel a été le premier contact. 
Par la suite, je suis allée la voir au local de notre équipe pour faire sa connaissance et elle m’a indiqué qu’elle avait un petit garçon qui aurait besoin de soutien scolaire. J’ai pris en charge Emmanuel à partir de ce jour-là. C’était notre première rencontre en présentiel.

Quelles ont été vos premières impressions l’une de l’autre ?

Armelle : J’ai trouvé une personne attentive, à l’écoute, touchée par ma situation, très gentille.
Jeanine : Au premier contact avec Armelle, j’ai tout de suite ressenti un sentiment de compassion, avec l’envie de soutenir cette jeune maman motivée par son désir d’intégration, pour elle et pour son fils.

Aviez-vous des attentes ou des appréhensions au début de cette relation ?

Armelle : Oui, je savais que mon parcours serait difficile, et j’avais peur de ne pas être aidée, soutenue dans le temps.
Jeanine : Armelle me sollicitait beaucoup, car elle n’avait personne sur qui s’appuyer. Je redoutais énormément l’échec de sa demande.

Comment s’est construit, petit à petit, le lien de confiance entre vous ?

Jeanine : Pour Armelle, j’étais devenue effectivement sa personne de confiance. Elle attendait ma venue  pour regarder sur son téléphone les messages qu’elle recevait et pouvoir y répondre (d’ordre administratif ou scolaire pour son fils). Nous faisions la réponse ensemble. Ce lien s’est encore renforcé lorsque j’ai pris contact avec son assistante sociale, chargée des demandeurs d’asile. Cette dernière est venue me rencontrer. Nous avons travaillé et accompagné Armelle, ensemble.

Comment avez-vous abordé ensemble la question du recours après le refus de la demande d’asile ?

Jeanine : Le refus du titre de séjour a été vécu comme un échec. Armelle en a été très affectée, mais pas question de baisser les bras.
J’ai contacté son assistante sociale à Annecy, qui n’était pas très optimiste, mais ensemble, nous avons décidé que Armelle devait faire appel de cette décision. Elle était bien consciente des difficultés à venir mais les a acceptées. Armelle n’avait pas d’autre choix . Elle ne voulait pas être renvoyée  en Italie et surtout pas dans son pays d’origine, la Côte D’Ivoire.
Sa seule perspective était son intégration personnelle en France, mais surtout pour son fils parfaitement bien intégré dans son école et la Paroisse.

Quel rôle chacune a-t-elle  joué dans cette démarche : soutien moral, administratif, juridique ?

Armelle : Le soutien moral de Jeanine a été primordial, à ce moment-là.
Jeanine : J’ai pu contacter son avocat désigné d’office pour avoir les informations nécessaires pour sa convocation, mais Armelle a très vite pris le relais en le contactant directement lorsque c’était nécessaire.

La parole s’est-elle libérée progressivement ? Qu’est-ce qui a facilité cette ouverture ?

Armelle : Non, la parole s’est libérée très difficilement.
Jeanine : Armelle est une personne discrète, pudique, qui ne se livre pas. Le refus de son premier titre de séjour a été un déclic pour qu’elle accepte de se livrer, d'ouvrir son cœur, et de raconter partiellement l’histoire de sa vie. Son assistante sociale et moi-même l’avions motivée dans ce sens en vue de son passage devant les juges.

Y a-t-il eu un moment particulièrement émouvant ou marquant dans vos échanges ?

Jeanine : Le moment le plus émouvant, et auquel je ne m’attendais pas, c’est lorsque Armelle me téléphone, un matin à 11 heures : cris, pleurs, rires, tout se mélangeait. Je ne comprenais rien, et impossible pour moi de la calmer. Bien sûr, elle venait d’obtenir son titre de séjour !

Y a-t-il eu un moment clé où vous avez senti que la relation changeait, devenait plus profonde ?

Armelle : Pas vraiment, les choses se sont faites tout naturellement dans le temps.
Jeanine : L’accompagnement d’Emmanuel dans sa demande de baptême, a été un moment très fort. J’étais le relais bien sûr entre les catéchistes et la maman pour suivre de manière assidue les cours de catéchisme. Mais le moment le plus émouvant c’est lorsque Armelle m’a demandé d’être la marraine de baptême de son fils. Belle et inoubliable cérémonie !

Comment décririez-vous aujourd’hui votre relation ? A-t-elle évolué au-delà de l’accompagnement initial ?

Jeanine : Notre relation s’est renforcée au fil du temps. Les épreuves traversées ensemble nous ont permis de tisser des liens d’affection et de confiance proches des liens familiaux.

Qu’est-ce que cette relation vous a appris sur l’écoute, la patience, la solidarité ?

Armelle : Cette relation m’a tout apporté, tout.
Jeanine : L’écoute, la patience, la solidarité sont les qualités premières pour un bénévole au Secours Catholique. Mais je crois que dans l’accompagnement, il faut y ajouter la persévérance. Espérer envers et contre tout même si le chemin est tortueux.

Qu’est-ce que cette expérience a changé en vous, en tant que bénévole / en tant que personne accompagnée ?

Jeanine : Je suis admirative devant cette maman qui a pris tant de risques. Je suis heureuse d’avoir pu contribuer à la finalisation positive de sa situation, et cela me donne l’envie d’être toujours plus proche de nos frères en souffrance.
Armelle : Cette expérience m’a permis d’avoir plus confiance en moi, d’être rassurée pour affronter les difficultés de la vie quotidienne.

Quels messages souhaiteriez-vous transmettre à d'autres personnes dans des situations similaires ? 

Armelle : Il ne faut jamais se décourager, aller au bout de ses idées, et surtout rencontrer les bonnes personnes qui sauront être là quand vous aurez besoin d’aide.